Lyon Poche : On a rarement vu un humoriste qui était aussi heureux de se produire sur scène...
Ary Abittan : C’est vrai que je suis heureux parce que la scène, c’est mon premier amour, parce que c’est le lien avec le public. Il m’a attendu, et ça, c’est vraiment extraordinaire.
LP : Qu’est-ce que vous avez le plus manqué dans ce contact avec le public ou le fait de monter sur les planches ?
AA : Le bonheur de faire rire les gens, en fait. Le bonheur de retrouver, évidemment, le public. Le bonheur aussi de me dire, 'tiens, ils m’ont attendu, ils sont là'. Je crois que ce qui me manquait, au fond, je vais vous dire, c’était moi. Voilà, je me suis manqué, moi, tout seul à la scène. Alors aujourd’hui, je partage, je suis vivant, et ça, c’est déjà extrêmement bien. J’ai retrouvé l’essentiel, quoi.
LP : Dans le spectacle, vous dites que pendant trois ans, c’était tous les jours dimanche. Ça y est, vous êtes sorti de la spirale, c’est la semaine, là ?
AA : Ouais, ça y est, on recommence, là, c’est lundi. Je reviens juste comme ça, vivre. Reprendre la scène, retrouver les gens, c’est tout, et je vous assure, c’est déjà beaucoup. Je ne reviens pas pour prouver quelque chose, je reviens, parce que la justice a parlé, que la vie a continué, et que j’ai encore plein de choses à dire, et surtout à partager. Je reviens d’un endroit profond, et maintenant, j’ai envie de rire avec les gens. C’est ça, mon retour. Je reviens sans bruit.
LP : Alors vous revenez pas sans faire comme si rien ne s’était passé, parce que vous parlez de l’affaire dans le spectacle, vous arrivez à en faire rire. C’était une manière de redevenir vous-même, en tout cas, de pouvoir parler de ces années sombres pour vous ?
AA : Je parle de ce que j’ai vécu, je ne parle pas de l’épreuve elle-même, je parle de ce qu'il y a eu après l’épreuve. Oui, j’en parle, mais j’en parle pas pour rejouer l’histoire, pas pour convaincre, pas pour défendre, j’en parle parce que c’est quelque chose que j’ai traversé. Et dans la vie, ce qu’on traverse, on peut le transformer. Et je crois que le rire, c’est ça. C’est un spectacle sur la chute, sur le silence, sur l’ego qu’on enlève, sur comment on se relève. C’est un spectacle sur l’humain, en fait, sur la fragilité, sur la force, sur la vie. Je ne règle de comptes avec personne. Je raconte comment on passe à travers une tempête et comment, un jour, on retrouve la lumière. Et les gens rient parce qu’ils se reconnaissent, en fait. On a tous traversé des moments où tout s’écroule. Et on a tous eu ce moment où on s’est relevé. C’est ça que je raconte.
LP : Vous évoquez votre reconstruction personnelle. Il y a le psy, il y a le rabbin, il y a vos enfants, il y a vos parents. Tout ça, ça a été des étapes déterminantes pour votre retour sur scène ?
AA : Vous savez, quand on a les deux genoux à terre... Alors oui, la foi, ça a été un appui. Ce n’est pas été une fuite. Ce n’est pas une explication. C’est juste un appui. Encore une fois, quand tout s’écroule autour, il faut un endroit qui ne bouge pas. Pour moi, ça a été la foi. La foi, ce n’est pas fermer les yeux. Au contraire, c’est regarder la réalité en face et continuer quand même. C’est ce qui m’a permis de ne pas me perdre, de rester droit, de rester vivant. La vie, elle ne nous arrive pas pour nous détruire. Elle nous arrive souvent pour nous révéler.
LP : Est-ce que vous trouvez que cet épisode et puis aujourd’hui ce spectacle, c’est un peu celui de la maturité qui vous fait rentrer dans une nouvelle étape de votre vie que vous n’aviez potentiellement pas envisagée ?
AA : On peut l’appeler comme ça, la maturité, c’est surtout le show de la vérité, parce que quand on traverse ce que j’ai traversé, on n’a plus envie de tricher. On n’a plus envie d’enjoliver, on dit les choses, on les dit simplement. Et c’est pour ça que ce show s’appelle d’ailleurs Authentique. Alors si c’est ça la maturité, alors oui. C’est le show d’un homme qui a vécu. Mais ce n’est pas un show sur ce que j’ai vécu, c’est un show sur ce que ça m’a appris.
Infos
Authentique
Le 25 novembre à 20h
Bourse du Travail, Lyon 3. De 42 à 45 euros