Il préfère la rareté à la frénésie, l’image à l’algorithme, la scène lyonnaise à l’exil parisien. À l’heure où les artistes multiplient les singles pour exister et chercher à être référencés, Leonem, rappeur lyonnais de 22 ans, a fait un choix radical : produire peu, mais frapper fort. "Je n’aime pas sortir des sons ultra souvent, même si j’en ai plein en stock", assure-t-il.
Son style ? "Cinématographique", répond-il sans hésiter. "Même dans les productions sonores, j’essaye d’ajouter une dimension cinématographique. Je dirais que c’est épique même parfois."
Il revendique une liberté totale de ton et de forme. "Je peux faire autant de la drill que du boom bap."
Et ajoute : "Pour moi, il n’y a pas plusieurs sortes de rap. Le rap, c’est du rap. Tu peux aussi bien faire un son qui fait danser. Le principal, c’est qu’il y ait deux ou trois punchlines qui peuvent faire sourire. C’est aussi pour ça qu’on écoute du rap."
Son objectif : marier rap et cinéma pour créer des œuvres à fort impact visuel et sonore. "Je veux que chacune de mes sorties soit un événement, un peu comme pour un film de Christopher Nolan."
Passion pour le cinéma Leonem n’est pas un nouveau venu. Musicien autodidacte, il apprend dès l’enfance la guitare, le clavier, puis la MAO, en rêvant de composer des musiques de films comme Hans Zimmer ou John Williams. Il découvre ensuite le rap, influencé par Kanye West, Kid Cudi ou Kendrick Lamar. "J’ai toujours fait de la musique depuis petit, que ce soit de la funk, du rock ou du jazz, mais je me suis spécialisé dans le rap sur la fin du lycée", raconte-t-il.
Après des années de collaborations et de collectifs locaux, il se lance en solo en 2023 avec un clip marquant : La Plaie. Un tournant dans son parcours. "J’aime faire des beaux clips avec des vrais visuels cinématographiques parce que ma deuxième passion, c’est le cinéma", explique Leonem. Pour chaque sortie, il organise même des projections en salle, à l’image de ses modèles du 7e art.
S’il avance à son rythme, ce n’est pas par manque de contenu. "J’ai entre 20 et 30 sons prêts, mais j’ai une stratégie sur 3 ans afin de sortir l’album au bon moment." Le plan est clair : "Sortir un ou deux clips par an, mais des gros gros clips, chaque fois de plus en plus fat."
Une académie du rap
Totalement indépendant, Leonem avance en duo avec sa compagne. Ensemble, ils ont monté leur propre label et boîte de production : Grande Avenue. "Même si on n’a pas un budget énorme, ça nous permet de faire ce qu’on veut", glisse-t-il. Son ambition dépasse la musique. Il veut bousculer les lignes du rap français, souvent recentré à Paris. "J’ai monté mon label et en dessous du logo, il y a marqué Lyon et j’en suis très fier." Il enchaîne : "Je veux vraiment inventer un nouveau modèle pour que le monde du rap ne soit plus centralisé à Paris."
Pour lui, il faut construire localement : "Ce que Jean-Michel Aulas a fait à Lyon avec le sport, il faut faire la même chose dans la culture. Il faut penser à une académie, des terrains d’entraînement, plus de salles, plus de festivals."
En parallèle, Leonem prépare un spectacle visuel et immersif. Il veut multiplier les dates dans la région lyonnaise cette année. "Mon objectif, c’est de tout casser. Je me donne trois ans. Et ce que je veux par-dessus tout, c’est faire des concerts, je veux me produire le plus possible."
Et tant pis si la stratégie n’est pas celle des autres. "C’est risqué, mais j’essaye de faire des trucs très impactants, qui marquent les esprits." Il conclut : "Des fois, quand tout le monde va dans un sens, c’est bien de faire un petit pas de côté et d’essayer d’aller un peu ailleurs. Ça ne peut pas faire de mal d’essayer de faire autre chose."
Infos
Dimanche 20 juillet à Woodstower (parc de Gerland, Lyon 7)
Jeudi 2 octobre à Bizarre! (Vénissieux)